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Sur nos murs - 40 ans de Graffiti avec agnès b.

J'ai commencé dans les rues de Dijon en 1979, en faisant de la « bombe libre ».

Pas de galerie pour me représenter en tant que peintre « Classique. Agnès était au top de la mode ! Exposer chez elle nous assurait une visibilité maximale !» Même réaction du côté de Miss.Tic qui avait débuté un an plus tôt, en 1985, dont les pochoirs associent une esthétique rock'n'roll à des poèmes ou aphorismes. « Je ne sais plus par quel "téléphone arabe" on est arrivé jusqu'à moi, mais j'ai accepté immédiatement ! Je n'avais encore jamais travaillé sur toile, j'ai proposé des œuvres sur papier. C'étaient un peu mes essais, mes brouillons, qui collaient exactement avec ce que je faisais dans la rue. » Le très débonnaire Epsylon Point, trente-six ans à l'époque, confirme. «En me proposant d'exposer, le mec de la galerie m'a dit :"J'aime bien ton travail, mais il faut que tu fasses ça sur toile si tu veux en être." Alors je me suis lancé. Je n'étais pas du genre à me poser trop de questions. J'en avais rien à foutre, galerie ou non, toile ou mur, on me propose de peindre, je peins !» Il se souvient du travail de Miss.Tic, qu'il voit réaliser ses œuvres, alors qu'il s'apprête à attaquer la sienne. «Elle a tracé un trait en plein milieu d'une grande feuille de papier, sur laquelle elle a travaillé pendant une dizaine de minutes avec son pochoir. Lorsqu'elle a terminé, on s'est aperçu qu'elle était en train de faire une carte postale avec un poème écrit à côté.» Lui, réalise son œuvre avec La Signe, une amie avec qu'ils s'essaient à la discipline : « Je savais dessiner dans un style réaliste, lui ça n'était pas trop son truc, il m'a donc proposé qu'on s'associe pour peindre des pochoirs. C'est ainsi que j'ai dessiné "Conan le Barbare". Il l'a découpé et on est partis le peindre sur le mur en face de chez nous, rue Leblanc, dans le XVe.»

L'exposition des pochoiristes ouvre en mars 1986 avec des œuvres de Jeff Aérosol, Blek le rat, Marie Rouffet (décédé en 2019), Midnight Heroes, Miss.Tic, Midnight et Stress, Epsylon Point, La Signe, VR, Ulys, Le Loup, Zen, Etherno, Lulu Larsen et Jean Faucheur. Elle marque le début d'une carrière en galerie pour plusieurs des artistes qui y participent. Pour Miss.Tic, cela coulait de source. «Il faut savoir que lorsqu'on fait du pochoir, ça n'est pas comme les artistes qui peignent à la bombe, à main levée. Il y a tout un travail préparatoire, où l'on doit réaliser le dessin et ensuite le découper sur un carton. Très vite il faut de la place, des matériaux, de l'argent pour produire ces pochoirs, comme n'importe quel peintre en a besoin. C'est avant tout un travail d'atelier. Du coup, exposer et vendre nos œuvres, c'était forcément l'étape suivante.» Blek le rat voyait plus grand déjà : «J'ai toujours su que nous étions au début d'une grande histoire, qu'elle allait se propager dans le monde entier. J'avais une éducation artistique, j'avais compris.» J'ai commencé dans les rues de Dijon en 1979, en faisant de la « bombe libre ». Je peignais le nom de mon groupe de rock, Les Araignées du soir, des phrases comme « Dieu est mort » sur des églises, ce genre de conneries. La première fois que j'ai utilisé cet outil, ça m'a fait un flash dans la tête, comme dans les bandes dessinées qu'on lisait à cette époque-là. « Eurêka ! J'ai trouvé ! » Avec elle, peindre devenait une danse ! C'était fluide. Tu peux écrire sur n'importe quel mur, même pourri. Alors que du temps où je faisais des graffitis politiques, j'utilisais des rouleaux qui se salissaient immédiatement. Le mur « restait dessus », c'était une galère sans nom ! Alors qu'avec une bombe, tu pouvais écrire toutes les insultes possibles! Avant cette merveilleuse découverte, aux Beaux-Arts j'avais essayé la peinture sur toile, mais je n'aimais pas toucher le support. Je trouvais ça limitant. Un jour, j'ai eu besoin de réaliser une image bien faite pour une peinture. L'un de mes amis m'a initié au pochoir. Arrivé à Paris, j'ai vu ceux de Blek le rat qui m'ont donné envie de poursuivre dans cette voie. J'ai choisi de peindre un Conan le Barbare, réaliste, en grand format. J'avais aussi plein de petits pochoirs qui représentaient des lutins et des bestioles en tous genres. Puis, vers 1983, je suis (re)devenu plus politique. Comme je composais toujours des fonds colorés à la bombe libre avant de poser mon pochoir dessus, je ne me sentais pas limité. Je pouvais avoir une grande base abstraite de deux mètres par trois, et poser des petits pochoirs ici et là. Cela restait de la peinture libre. Le pochoir n'était que l'un des ustensiles qui me permettaient de m'exprimer.

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